S’il y a bien une attitude qui rend tout propriétaire de chien mal à l’aise, c’est celle-ci ! Tantôt qualifié de chien obsédé, tantôt de chien dominant, et si votre “chevaucheur” était simplement émotif ?
De quoi parle-t-on?
Le chevauchement est l’action de saisir fermement avec les pattes avant, avec ou sans mouvements de reins. Il peut se produire aussi bien sur un second chien, qu’un humain, un objet ou un autre animal ; il n’est pas rare également de voir un chien continuer les mouvements de reins alors même qu’il n’est plus sur l’objet du chevauchement, le chien continuant quelques instants “dans le vide”.
Bien que dérangeant pour l’humain et parfois pour les autres chiens qui le subissent, le chevauchement est un comportement normal et naturel du chien, qui fait partie de son répertoire de communication. Si ce comportement est vraiment fréquent, répétitif, que le chien y passe un grande partie de son temps, ou qu’il se présente systématiquement dans certaines situations, il convient de s’interroger sur les causes afin de pouvoir agir pour en diminuer l’impact et la fréquence.
Pourquoi mon chien chevauche-t-il ?
Il existe plusieurs causes pouvant expliquer le comportement de chevauchement.
- La première, et la plus évidente, est la cause sexuelle. Les chevauchements apparaissent alors en général à la puberté du chien, lorsque le niveau d’hormones sexuelles augmente. Le chien mâle qui chevauche sera en érection et sans intervention de l’humain ou du chien chevauché, le comportement se maintient généralement jusqu’à éjaculation. Les femelles peuvent également présenter ce comportement, souvent en lien avec un dérèglement hormonal. Le chevauchement sexuel peut aussi avoir lieu sur les humains, ou sur des objets (c’est une forme de masturbation). Si le chien chevauche un humain ou un objet inadéquat, il est possible de le réorienter calmement vers quelque chose d’autorisé, comme son coussin ou sa peluche. Si ce comportement prend beaucoup de place dans la vie du chien, il est souhaitable de faire un contrôle hormonal chez le vétérinaire pour détecter un éventuel dérèglement.
- Le chien peut également chevaucher dans le jeu ; en effet, le jeu a pour fonction de reproduire les comportements normaux hors contexte, comme un entraînement : on y retrouve des éléments du combat, de la chasse, etc. mais sans la mise en danger. Il n’est donc pas étonnant qu’il y ait aussi “entraînement à la reproduction”. S’il intervient dans une session de jeu à de courts moments, mêlés à d’autres actions (course, jeu au sol, simulacre de combat...) sans prendre plus d’importance, il n’y a pas lieu de s’inquiéter ou d’intervenir. Si le chevauchement prend le dessus sur les autres comportements, ou que le chien chevauché est mal à l’aise et que le chevaucheur ne respecte pas ses signaux, il est alors nécessaire d’intervenir en rappelant le chien pour un moment de calme.
Dans le jeu, il peut y avoir également une grande montée d’excitation, et le chien peut chevaucher pour s’en décharger. Le chevauchement se fait alors insistant et il est important de permettre un retour au calme en rappelant le chien, car il y a alors un risque de bagarre entre les 2 chiens.
- Le chien peut également chevaucher pour attirer l’attention (d’un autre chien ou de l’humain). Les chiens remarquent rapidement quels sont les comportements qui engendrent des réactions quasi-systématiques (quelles soient positives ou négatives). Si le chien n’arrive pas à obtenir ce qu’il souhaite avec des postures de jeu, une tête posée sur la cuisse pour demander une caresse, des couinements pour pouvoir sortir dans le jardin courir après les oiseaux.... il peut alors sortir “l’arme ultime” du chevauchement, qui fera quasiment à coup sûr réagir l’humain ou le chien chevauché. Et plus ça marche, plus il va utiliser facilement ce comportement lorsqu’il veut de l’attention. Autrement dit, il n’essayera peut-être plus de poser sa tête sur votre cuisse pour avoir votre attention et passera directement au chevauchement.
Dans cette situation, stoppez calmement le comportement de votre chien et proposez-lui un comportement alternatif : il veut une caresse? D’accord, mais il faut la demander poliment, en s’asseyant par exemple. Entraînez-vous à repérer les signes précurseurs du chevauchement (en général, le chien s’approche dans une posture particulière, arrière-train un peu arqué, queue haute frétillante, et vient très proche pour pouvoir prendre son appui) et anticipez en lui demandant le nouveau comportement souhaité avant qu’il ne puisse commencer à chevaucher. Si tout de suite après avoir cessé, il recommence, redirigez-le vers une autre activité acceptable (une activité masticatoire, un jouet, une activité olfactive) ou mettez le dans une autre pièce ou le jardin quelques minutes le temps qu’il se calme. Et s’il est souvent en demande, interrogez-vous sur son quotidien : est-il suffisamment dépensé? Ou au contraire n’est-il pas trop stimulé?
- Le chevauchement peut avoir un but d’apaisement pour le chien face à une situation qui le met mal à l’aise ou à un trop-plein de stimulations ; ne sachant pas comment gérer cette émotion, il va mettre en place ce comportement qui à un effet apaisant sur lui. C’est le cas par exemple quand le chien chevauche à l’arrivée d’invités. Il peut alors être utile de le mettre à l’écart le temps de l’accueil et des effusions, et de lui proposer de revenir une fois tout le monde installé. Il sera peut-être nécessaire également de le réhabituer de façon progressive à gérer ses émotions face à des stimulations inhabituelles.
- Enfin, un chien anxieux ou peu sûr de lui peut chevaucher pour se rassurer en testant la réaction de l’autre. Est-ce qu’il tolère? Si oui, le chien se sent alors plus serein, mais un chien très anxieux peut avoir besoin de refaire cette “vérification” plusieurs fois. Le problème, c’est que si le chien en face réagit en repoussant le chevaucheur, l’anxiété de ce dernier va monter en flèche, c’est donc un cercle vicieux. Dans ce cas là, il est alors important de travailler sur la confiance en soi du chien, lui faire rencontrer des congénères pacifiques et valoriser toutes les approches vers l’autre chien qui sont adaptées (reniflage, posture de jeu, manifestation de son anxiété par des signaux corporels et un éloignement...). Un travail de fond peut s’avérer utile pour augmenter le seuil d’émotivité du chien (seuil à partir duquel ses émotions prennent le dessus).
Vous noterez que dans les causes possibles de chevauchement, on ne retrouve pas de notion de dominance. Si le chien peut chevaucher pour contrôler un autre chien trop turbulent à son goût, ce n’est pas pour asseoir une quelconque dominance mais pour soulager son anxiété ou son irritation face à cette agitation, ou décharger son excitation. Quant à la dominance d’un chien sur son maître, on entre là dans le cadre des mythes et fantasmes, la hiérarchie interspécifique n’existant pas.
En résumé, le chevauchement occasionnel est normal et fait partie de la communication canine. Lorsqu’il devient trop fréquent ou qu’il se produit sur les humains, il est nécessaire de s’interroger sur la cause de ce comportement pour pouvoir y répondre de manière adaptée ; il existe des causes médicales au chevauchement (dérèglement hormonal) qu’il faut écarter avant tout travail si le chevauchement a une place prépondérante dans la vie du chien et qu’il se produit aussi bien sur les êtres vivants que sur les objets.